Assise à une table à contempler le paysage par la fenêtre, je cherche quoi écrire. Je me demande quels mots peuvent valoir la peine qu'on les couche sur le papier, qu'on les partage ? Et parfois, quand je pense à toutes les idées d'articles qui se trouvent dans mon crâne, j'ai peur.

Oui, j'ai peur. J'ai peur d'écrire pour un journal sur un site web. J'ai peur d'écrire pour un lectorat qui ne dépassera jamais les 40 personnes. Et vous savez pourquoi j'ai peur ? Parce que je connais la puissance des mots. Je connais ces mots qui sont caresses autant qu'ils peuvent être coup de poing.

J'ai peur parce que les mots m'ont fait mal et qu'aujourd'hui, je sais qu'ils vont faire du mal à d'autres. Je sais que la chute ne tient qu'à une phrase, qu'à une parole, à l'heure où les drames se cachent derrière des murs d'incompréhension, se dissimulent sous des étoffes de rancœurs dissimulées.

C'est ridicule n'est-ce pas ? Sans doute un peu.

Mais ça ne l'est pas plus que d'ouvrir un message pour se voir reprocher d'avoir dit, même si maladroitement, la vérité. Oh non ce qui est ridicule, c'est de devoir peser chacune de ses paroles pour vérifier qu'elle ne sera pas retournée contre nous plus tard. C'est se rendre compte que les mots se fixent sur le cœur de chacun pour empoisonner.

C'est ridicule à en pleurer de penser que de simples mots, à force d'être répétés, transforment des blagues voir des mensonges en vérité. C'est ridicule de voir que de simples suite de lettres, quand elles s'imprègnent dans l'inconscient collectif, effacent l'idée du vivre ensemble, tuent la possibilité d'un pardon et détruisent toute forme de communication.

Je rêve d'un site où je pourrais parler avec le ton qui me chante, dérouler ma prose l'esprit léger. Cependant, cela ne sera jamais possible. Jamais. Parce qu'il y aura toujours des gens pour condamner un écrit pour éviter de se remettre eux même en question. Après tout, il est toujours plus facile de reprocher sa tenue à quelqu'un que d'avouer qu'on en manque soi-même.

Je ne reproche rien, je n'accuse personne. Je constate seulement. Je lance une bouteille à la mer, un message dans le vent. Et je prie, pour que ces mots, s'ils trouvent une terre accueillante, puissent faire naître un arbre prospère : la réflexion. Car les fruits de cet arbre, que sont l'introspection et le recul, seront sans doute les seuls à même de sauver P12.

 

https://zupimages.net/up/20/06/yhee.png